Les Seigneurs et les Avoués

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Seigneuries, Avouerie, Avoués (1)

Dans son « Dictionnaire géographique, historique et archéologique du Hainaut », édition de 1891, Th. Bernier écrit que la seigneurie de Leernes appartenait en 1204 à Thierri de Leernes. C'est là une erreur manifeste, car l'abbaye de Lobbes possédait depuis longtemps, à cette époque, la haute, la moyenne et la basse justice à Leernes.

Il se peut, toutefois, que la famille de Leernes y ait possédé un fief et qu'elle tira son nom de cette localité, mais rien n'est venu justifier cette opinion

Quoi qu'il en soit, l'existence de la famille de Leernes est établie par des lettres de 1159 de l'évêque de Liège, faisant connaître que Thierri de Lerne (de Lerna) - avec sa femme et tous ses enfants - donna à l'abbaye d'Alne ce qu'il possédait de fief et d'alleu à Fontaine-sur-Sambre, à titre d'hérédité de ses aleux.

En 1169, Jean, abbé de Lobbes, déclara que son vassal, Théodricus de Lerna, lui avait engagé

  • pour 11 marcs de Cologne et 100 sous de Valenciennes, les fiefs qu'il tenait de lui à Strée et à Jumet

  • pour un demi marc tout ce qu'il tenait de l'abbé à Behegniae (Beignée).

L'engagement eut lieu en présence et avec le consentement des fils de Thiéry et pour une période de dix ans.

Parmi les témoins figurèrent Gérard de Leernes, Francon de Fontaines et Gislebert son frère.

D'un acte de transport, d'octobre 1195, il résulte que Galterus de Lerna céda à l'église de St-Théodard de Thuin, un fief situé à « Beignies » et tenu de l'abbaye de Lobbes. Galterus avait hérité ce fief d'un certain Philippe. Les frères de Galterus, soit Thiery, l'avoué, et Gérard, agréèrent cette cession, qui avait été autorisée, en 1192, par l'abbé de Lobbes, sous la réserve que l'église de St-Théodard paierait chaque année, à l'abbaye, un cens de douze deniers de Namur et que chaque manant lui donnerait une poule à la Noël.

On voit encore, par des lettres de 1204, de l'évêque de Liège, que Godefroid de Thuin, Wautier de Fontaine et Thierri de Lerne ont, par la main de Jean avoué de Thuin, cédé à l'abbaye d'Alne, leurs droits sur 40 bonniers de bois, situés à Montigny.

L'abbé de Lobbes, à titre de son église, était seigneur tréfoncier du village de Leernes et Wespes; où il avait la haute, la moyenne et la basse justice. Il lui était dû en 1773, sur chaque bonnier d’héritage, à la Noël, un demi setier d'épeautre et à la deuxième fête de Pâques 15 deniers blancs, sauf que sur 26 bonniers, 2 journels 1/2 spécialement payait, pour chacun, que 18 deniers louvignois, sans épeautre.

L'abbaye percevait, en outre, des rentes en argent , chapons et foaces (pain cuit, galette, gâteau) sur 29 héritages situés à Leernes parmi lesquels il y a lieu de citer la cense Delporte appartenant aux Soeurs-Noires de Maubeuge, la maison et le pourpris du four à verres, le château, les prés et les héritages de la Jonchière, les 19 bonniers sur Landelies, donnés en arrentement par l'abbaye au seigneur de Landelies, et devant annuellement 13 florins, la chapelle de St-Nicolas et un bonnier de terre sur lesquels le chapitre de Binche devait 2 chapons à la Noël.

Leernes et Wespes étaient du nombre des six villes appelées les pourchaintes (enceinte, étendue) de St-Pierre de Lobbes,. Quant à l'abbaye de Lobbes, elle était tout entière un fief de l'évêché de Liège, que les abbés relevèrent successivement en bloc à partir du XVIe siècle, sans spécifier les biens, rentes, revenus, seigneuries et hommages, appartenant à leur église.

Toutes les terres qui composaient la paroisse de Leernes et y devaient la dîme, étaient aussi redevables des rentes foncières à l'abbaye de Lobbes, tant par-delà Fontaine que par-deçà, tirant vers la Marche, Forchies et autres quar­tiers circonvoisins. Elles étaient mouvantes de la sei­gneurie de Leernes, abstraction faite le celles pour lesquelles il avait été autrement disposé par l'accord fait avec le baron de Fontaine, le 24 mai 1681, et dont il sera question ci-après.

Comme nous l'avons vu, Fontaine-l’évêque n'était autrefois qu'un hameau dépendant de la paroisse de Leernes.

Sur le terroir de Leernes, existait, entre autres, un fief que tenait en 1211, Wautier, noble hommne de Fontaine, qui fit donation à l'abbaye de Cambron de toute l'église de Boegnies (St-Vaast) avec les dîmes majeures et mineures, les dotales et tous les biens appartenant à cette église, ainsi que toutes les dîmes de récoltes et d'animaux sur ses manses situées dans les limites de la juridiction de la dite église.

Cette donation fut ratifiée par Arnulphe de Moriamés, de qui les biens étaient tenus en fief.

Ce fief appartenait en 1324, à Bauduin, sire de Fontaine, chevalier. On lit, en effet, dans un dossier relatif aux con­testations qui subsistèrent, pendant plusieurs siècles, entre le comte de Hainaut et l'évêque de Liège, au sujet de la souveraineté sur Fontaine-l'Évêque, que Bauduin, sire de Fontaine, et demoiselle Aliénor d'Aspremont. sa future, se présentèrent à Lobbes, « le samedi prochain devant le jour de l'an 1324, devant Jakeme Roussiaus, chargé à cet effet par Jehan, sire de Bailleul (et de Morialmé), et que le dit Bauduin rapporta les hummiers (usufruits), profits, droitures et les revenus de tout le fief tenu du dit Sire de Bailleul gisant à Fontaines, au terroit et là entour, en bos en eawes en terres, prés, cens, rentes et autres droitures et revenus, pour assurer le douaire, tout le cours de sa vie de la dite Aliénor, qu'il entendoit prendre pour sa femme.

Au cours des démêlés qui eurent lieu de 1353 à 1356 entre l'évêque Englebert de la Marck et Marguerite, comtesse de Hainaut, au sujet de la délimitation de leurs domaines, Robert de Bailleul, sire de « Morialmeis » déclara que trois ans avant son mariage avec la fille de Bauduin de Fontaine, un peu avant le siège de Tournai Madame de Fontaine, sa belle-mère, avoit relevé de lui, comme sire de Morialmei, le douaire que son mari lui avoit fait. Il ajouta qu'il avait trouvé dans d’anciens registres de la terre de Morialmé, que le sire de Fontaine était homme au seigneur de Morialimé, du chef du fief de Boegnies, mais qu'il ne saurait se prononcer sur la question de souveraineté concernant le comte de Hainaut et l'évêque de Liège.

D'autre part, on voit que le 20e jour après Noël au mois de janvier 1324, par-devant Thiris dou Castelleir, bailli de Hainaut, et les hommes de fief, comparurent les mêmes Bauduin et Aliénor, et que Bauduin rapporta les « humiers, fruits, profits, droitures et revenus dou castiel de la ville, de la seigneurie et justice haute et basse de Fontaine et dou manage condist le Bouverie, séant dedans le fermeteit delleditte ville de Fontaine et de tout ce qu'il tient et doit tenir en fief et hommage du comte de Hainaut, en le ville de Fontaine, appartenances et appendances et alheurs partot là entour, pour parfaire à sa future, 1000 livrées de terre ou tournois par an, à loyal pris, sur les fiefs qui lui sont donnés à titre de douaire, tenus du seigneur de Bailleul et de l'abbé de Lobbes.

Des pièces qui précèdent, il résulte que le territoire de Fontaine-l’Évêque comprenait deux parties dont l'une ,voisine de l'église de Boegnies ou de Saint-Vaast, relevait en fief de la seigneurie de Morialmé, mouvant de l'évêque de Liège, et l'autre, de laquelle dépendaient le château et le manage de La Bouverie, que rappelle aujourd'hui une rue de ce nom, relevait du comte de Hainaut.

Cette situation explique les contestations auxquelles la question de souveraineté de Fontaine-l’Évêque donna lieu pendant plus de quatre siècles, sans qu'il ait été possible de la résoudre autrement que par la force. On sait, en effet, qu'en 1757, l'impératrice Marie-Thérèse fit occuper cette ville par les troupes impériales, au cours des négociations.

Des difficultés se produisirent aussi au sujet de la séparation des hauteurs de Leernes et de Fontaine-l’Évêque.

A la limite de ces seigneuries, il existait des terres reven­diquées par l'abbé de Lobbes et par le seigneur de Fontaine, qui se les disputèrent pendant plusieurs siècles.

Déjà, par une sentence arbitrale rendue en 1299 et dont il sera question plus loin, Pierre le Jumiaulx, bailli de Hainaut, avait ordonné de procéder au bornage de ces terres, mais il faut croire que l'accord ne put s'établir, car le différend dut être soumis aux échevins de Liège, en 1450.

Après avoir visité les lieux contestés, entendu les anciens habitants de part et d'autre, et examiné les chartes des deux communautés, les échevins, vu la difficulté d'établir la limite, avaient, par leur jugement du 15 octobre 1450, décidé qu'il y avait lieu « de partager le terrain en discus­sion, par moitié, au meilleur profit que faire soy porat d'une partie et d'autre, sans fraude, et ce, par les courts et justices de Fontaine et de Lyerne, pour cascun desdits seignerages tenir sa parchon de son costet et pardevers sa hauteur, au meilleur proffyt et d'icelle joyr à perpétuité ».

Le partage ordonné ne fut pas effectué, de sorte que les choses restèrent dans le même état.

Par un record du 22 septembre 1514, les échevins de Leernes et Wespes déterminèrent il est vrai, les limites de la seigneurie et du jugement mais les contestations continuèrent quand même, et c'est en 1684 seulement, à l'intervention de l'abbé d'Aulne et de messire Antoine, baron de Corswarem que l'abbé de Lobbes et Michel-Luc-Camille de Rodaan (sic), baron de Fontaine-l'Évêque tombèrent d'accord pour fixer la séparation entre les territoires de Leernes et de Fontaine-l'Évêque.

Ces limites sont indiquées dans l'acte d'accord qui fut passé au monastère de Lobbes, le 24 mai 1684, en présence de deux notaires, de deux hommes de fief du Hainaut, des abbés d'Aulne et de Lobbes, et des barons de Fontaine et de Corswarem.

Aux termes de cet acte, il était permis à ceux de Leernes de se servir en tout temps des fontaines de Baillissart pour inonder leurs prés sans que l'on pût les en empêcher ni détourner les eaux à leur préjudice. Les chemins faisant limite entre les deux localités, devaient être visités par les deux cours de justice, mais ceux de Leernes ne pouvaient « calenger », condamner à l'amende, n’astreindre aux réparations, les marchissants (riverains) du côté de Fontaine, et réciproquement. Les officiers des deux cours devaient s'entendre pour effectuer conjointement la visite de ces chemins ; en cas d'absence de l'une on l'autre cour, celle qui était présente pouvait effectuer l'opération et le jugement rendu par elle était mis à exécution comme si les deux cours y avaient pris part. 

En cas de crime ou d'autres actes « de hauteur » commis dans les dits chemins, la connaissance devait en appartenir au baron de Fontaine.

Il fut convenu aussi que tout héritage appartenant à ce dernier et qui ferait partie du territoire de Leernes, ne serait sujet à aucune taille ni cens seigneuriaux, et que l'on ne pourrait y ériger de potence, gibet ou autres machines de justice, et ainsi réciproquement pour les héritages appartenant à l'abbaye, et qui seraient situés sur Fontaine. De plus, les deux seigneurs ne pourraient prétendre aucun droit de seigneurie haute, moyenne et basse, dans les limites pré-désignées, ni les communautés y établir aucune taille ou imposition quelconque ; mais tous les héritages devraient être, à l'avenir, sujets à la taille dans la juridiction sous laquelle ils se trouveraient, par suite de l'accord. Quant à ceux de Leernes possédant des héritages sur Fontaine, ils seraient tenus de payer la taille, à toujours, sans qu'elle pût excéder le nombre de douze, tandis que ceux de Fontaine qui posséderaient des héritages sur Leernes, devraient supporter toutes les tailles et impositions, à l'avenant des deux tiers.

Il fut encore entendu que les oeuvres de loi et de transport se feraient à l'avenir dans la juridiction d'où les héritages seraient mouvants ; que le « champiage » serait commun comme anciennement, et que l'on n'en aliénerait rien sans le gré des deux parties.

L'acte qui nous occupe comprenait aussi l'engagement, pour les contractants et les deux communautés, de n'exiger respectivement aucun droit de chausséage, hallage, étalage ou autres droits de cette nature, et de n'imposer aucun logement de soldats à ceux de l'autre communauté qui posséderaient, dans l’une des deux juridictions, des héritages sans maison.

Quant aux occupants de la ferme de la Forest appartenant à l'abbaye, ils auraient le droit de se réfugier librement avec leurs bestiaux, meubles, grains, fourrages et paille, dans la ville et château de Fontaine, sans devoir payer aucune imposition de ce chef à titre de rations, sauvegarde ou autrement.

L'abbé de Lobbes ayant, en suite de l'accord, renoncé à toute juridiction sur certains héritages tombant dans les limites de Fontaine et sur lesquels il « avait coutume » de recevoir des cens et des rentes, il fut convenu que le baron de Fontaine percevrait à l'avenir ces cens et rentes, et tout ce qui pouvait revenir à la seigneurie foncière, moyennant de payer annuellement à l'abbaye deux muids d'épeautre « à l'estrique » (à ras des bords de la mesure), mesure de Leernes, et un patacon en argent.

En promettant d'acquiescer et de satisfaire à tous les points fixés par la convention, les parties déclarèrent for­mellement n'avoir voulu apporter aucun préjudice aux droits des souverains et d'un chacun, leur intention étant de laisser sur le pied ancien les privilèges des deux com­munautés au sujet de la justice des actions personnelles.

En 973, l'abbaye de Lobbes obtint de l'empereur Othon Il la confirmation de nombreux privilèges, et l'autorisation d'élire un avoué pour défendre et administrer les biens compris dans l'enceinte on enclos du monastère.

Plus tard, en vertu d'une autorisation du pape Lucius III (1181 à 1185), l'abbaye érigea une avouerie dans sa seigneu­rie de Leernes et Wespes, elle choisit pour avoué le seigneur de Fontaine, avec charge principale de s'acquitter des devoirs de l'abbaye envers le souverain, et de défendre les terres et les droits du monastère contre toute agres­sion.

L’abbaye n'eut pas lieu de se féliciter de son choix soit que les conditions n'eussent pas bien été établies par l'acte d'érection de l'avouerie, soit, plutôt, que l'avoué, comme la plupart des seigneurs qui furent investis de cette dignité, ait voulu profiter le plus possible des avantages attachés à sa charge, toujours est-il qu'en 1200 ou 1201, le sire de Fontaine avait déjà violé les droits de l'abbaye. En 1245, Walter de Fontaine reconnut avoir le tiers seulement du bois de Leernes en raison de l'avouerie et garde du dit bois, ce qui fait supposer qu'il y eut désaccord à ce sujet.

Vers la fin du XIIIe siècle, de nombreuses contestations surgirent aussi entre l'abbaye et Bauduin, seigneur de Fontaine, chevalier, époux de Mahaut de Luxembourg, au sujet des droits seigneuriaux.

Le différend ayant été soumis à l'arbitrage de Pierre le Jumiauls, bailli de Hainaut, donna lieu à une sentence rendue par ce dernier « le samedi après mengier devant le triniteit 1299 », en l'hôtel Colart Gilart de Binche.

Le seigneur de Fontaine réclamait

  • des frais et dom­mages à l'abbaye qui avait arrenté des bois contre sa volonté et sans son gré ;

  • la mise en possession, en vertu d'un arrangement connu entre l'un de ses ancêtres et l'abbé Robiert de Broing, de 60 bonniers de bois destinés à être défrichés. Il reprochait, en outre, à l'abbaye d'avoir négligé de faire loi, c'est-à-dire d'établir les maïeur et échevins, et il demandait réparation des injures, diffama­tions et laidures, dont il avait été l'objet de la part du couvent.

Tout ayant été vu et examiné, l'arbitre prononça et déclara, sous la peine de 1000 livres, quant aux deux pre­miers articles, que l'abbé et son couvent n'étaient tenus à rien rendre au seigneur de Fontaine et qu'ils en demeu­reraient quittes, paisibles et absous à toujours. Quant au troisième article, le bailli déclara qu'il n'était pas établi que l'abbaye était en défaut et que le sire de Fontaine devait, de sa volonté, rendre son hommage à l'abbé, avec Bauduin son fils, et Sarasins dou Castelleir comme mambour.

Au sujet des injures, l'abbé et son couvent en furent absous et déclarés quittes et délivrés de la somme réclamée de ce chef par le seigneur de Fontaine.

De son côté, l'abbé de Lobbes prétendait être seigneur tréfoncier de la poesté (district, pouvoir, juridiction) des bois et des appendances de Leernes et Wespes, et avoir le droit d'y établir maïeur et échevins, sans devoir consulter à ce sujet le seigneur de Fontaine.

L'arbitre déclara que les prétentions de l'abbaye étaient bien établies et justifiées ; que, de plus, elle devait nommer deux sergents, comme seigneur tréfoncier, et le sire de Fontaine, un sergent, tous trois masuyers (propriétaire de maison) de Leernes et Wespes, qui seraient tenus de prêter serment entre les mains du maïeur, par-devant les échevins, de faire rapport de tous délits et autres faits commis dans les bois et ailleurs, et à juger par les dits échevins.

En cas d'arrestation pour forfaits ou autres cas, dans les villes de Leernes et Wespes, dans toute la « poesté » des bois et des appendances, les inculpés devaient être conduits en la maison et en la prison de l'abbaye appelée La Foreist, et jugés par les échevins.

L'abbé, en sa qualité de seigneur tréfoncier, devait avoir les deux tiers des profits lois et amendes payés, et le seigneur de Fontaine l'autre tiers.

Au sujet des aisances des bois, etc., que, d'après l'abbé, les gens de Leernes et de Wespes tenaient de lui, l'arbitre lui donna raison et décida que les cens et rentes qu'on payait de ce chef, soit une poule ou la valeur à déterminer par les échevins, appartenaient entièrement à l'abbaye.

L'abbé ayant, en troisième lieu, demandé que le seigneur de Fontaine fit relief des fiefs qu'il tenait de lui et de son église, il fut décidé que ce dernier et son fils, comme héri­tier, relèveraient ces fiefs, mais que, par contre, il ne pourrait rien leur être réclamé pour n'avoir pas fait, anciennement, les hommages voulus dans les délais prescrits.

Comme l'abbé reprochait au seigneur de Fontaine d'avoir empêché les gens de Leernes et de Wespes de jouir des aisances des bois, la sentence dit que l'abbé, seigneur tré­foncier, et le sire de Fontaine, en qualité d'avoué de l'église de Lobbes, et ses hoirs, laisseraient profiter ces gens de leurs aisances, moyennant le paiement de la rente et du cens dont ils étaient redevables de ce chef.

Quant aux mortemains, il fut prononcé que le sire de Fontaine n'y avait aucun droit sur les « tenables ne sour les masuiers de l’église », et que s'il avait perçu ce droit, il devait le restituer ; il était aussi tenu, à la réquisition de l'abbé ou du couvent, de faire loyalement et de bonne foi les cerquemanages (information faite pour connaître les limites d'un héritage, bornage) entre diverses propriétés situées à la limite des seigneuries de Leernes et de Fontaine, et au sujet desquelles il y avait contestation

Le bailli de Hainaut décida encore que l'abbé ni le seigneur de Fontaine ne pouvaient, à moins qu'ils ne fussent d'accord pour le défendre, empêcher les maïeur et échevins de Leernes et Wespes « de faire loi dans les cas et les choses qu'ils étoient accoutumés de juger ».

Enfin, d'après la sentence arbitrale, le sire de Fontaine, ses gens et son sergent devaient « être tenus quittes et absous de tout ce qu'ils avoient pris et fait à l'abbaye », moyennant les conditions imposées.

Et pour assurer l'exécution de la sentence, il fut enjoint au sire de Fontaine de rapporter, avant la mi-août prochaine, entre les mains du comte de Hainaut, toute la terre de Sebourg, pour en adhériter l'abbé et le couvent de Lobbes, à moins qu'il ne fit promettre par son fils aîné Bauduin ou ses autres hoirs, qui posséderaient les fiefs relevant de l'abbaye, de s'engager dans l'année de leur majorité, à tenir fermement et à toujours tous les articles de la dite sentence, sous peine de mille livres.

Il ressort de ce qui précède que le seigneur de Fontaine, non seulement avait voulu usurper les droits qu'il s'était engagé à défendre, mais que, de plus, il avait négligé de remplir ses devoirs envers l'abbaye, dont il tenait en fief l'avouerie de Leernes et Wespes.

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